
Préambule : J’ai reçu il y a peu un message privé singulier sur la messagerie de la page Facebook du mythe végétarien. Une végan avec qui je m’étais souvent disputée virtuellement sur ma page et mon blog, toquait à ma porte pour me raconter comment elle avait fini par remanger de la viande, du beurre, des oeufs….
- « Bonjour, vous souvenez vous de moi ? Mélissa, du blog La Starch Solution. Eh bien une grossesse et 8 mois d’allaitement ont eu raison de mon entêtement avec le végétalisme. Merci pour votre site qui est une mine d’informations. »
(Non ce n’était pas une vilaine blague)
Nous avons facilement pu discuter avec Mélissa, ex Plant Based, qui a repris un pseudo Facebook qui ne fait pas allusion à un régime alimentaire quelconque. Quel plaisir, de pouvoir discuter normalement, après des mois à s’être tirées dans les pattes ! Rapidement nous avons évoqué le fait de transmettre l’expérience de Mélissa, sous la forme d’un jeu de questions/réponses que voici :
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Le Mythe : Tu aurais envie de partager aux gens qui nous lisent la ou les raisons qui ont fait que tu es devenue végétalienne ou végan ? D’ailleurs tu préfères employer quel mot pour décrire ton parcours ?
Mélissa : Je suis devenue végétalienne stricte avant tout pour le côté santé. Dans ma vision des choses à ce moment là, le gras était mauvais pour la santé, la viande donnait le cancer… De plus je venais d’accoucher de mon premier bébé et j’avais pris quelques kilos que je voulais perdre. Comme à peu près tout le monde j’ai fait plusieurs recherches sur le web, et je suis tombée sur des vidéos françaises puis anglophones prônant le végétalisme. Je préfère employer le mot « végétalienne » je n’ai jamais été séduite par le militantisme ni par le jusqu’au-boutisme d’une idéologie. Précision : je parle de militantisme pour la protection animale.
Le Mythe : C’est intéressant ! Du coup l’aspect « souffrance animale » souvent mis en avant par la plupart des personnes qui évincent les produits animaux n’était pas ta motivation initiale. Tu te situais comment par rapport à ça, aux vidéos L214 par exemple ?
Mélissa : A vrai dire je n’en ai pas regardé beaucoup. Mais effectivement les scènes qu’ils ont filmées et diffusées sont atroces et devraient être sanctionnées. Je n’ai jamais fait de généralités à ce propos. Je pense que ce ne sont que les conséquences d’une production de produits animaux qui a été gangrenée par la production massive à tout va, au détriment de la condition de l’homme et de l’animal.
Le Mythe : Cet aspect militant n’était donc pas au cœur de ta démarche même si cela ne te laissait pas insensible. Tu dis que tu avais opté pour cette alimentation pour ses bénéfices de santé, tu peux nous parler de tes débuts en tant que végétalienne ? »
Mélissa : Lorsque ma fille a eu 1 mois j’ai modifié mon alimentation et opté pour le « RT4 » (Raw Till Four : une alimentation végan à forte tendance crudivore : beaucoup de fruits crus principalement jusque 16h00 puis féculent et légumes cuits le soir). En 6 mois j’étais à la limite de la stéatose hépatique, j’en ai beaucoup souffert. Suite à ça je n’ai pas remis en cause le végétalisme et me suis dirigée vers la Starch Solution (une alimentation basée sur la consommation de féculents et légumes cuits, avec la particularité de limiter drastiquement les graisses, même végétales.). Pendant deux ans je me suis sentie bien, je faisait du sport, j’ai allaité ma fille 14 mois sans soucis. J’étais tellement convaincue que j’ai crée un blog dédié à cette alimentation.
Le Mythe : Oui, tu avais crée un site qui faisait la promotion de cette façon végétalienne spécifique de s’alimenter, je me souviens l’avoir parcouru à l’époque. Je me souviens aussi les fois où l’on s’est « affrontées » l’une l’autre sur le sujet de l’alimentation sur ma page 🙂 Tu voudrais nous raconter un peu justement, maintenant que tu es de l’autre côté de la barrière, ce que l’on éprouve, ce qui nous anime quand on est convaincu d’un truc, et qu’on part en quasi « croisade » contre les personnes avec qui on a un désaccord aussi profond que celui que toi et moi pouvions avoir à l’époque ?
Mélissa : Je pense qu’il y a un certain désir de « sauver » les gens avec qui on parle. Nous, nous sommes dans le vrai et les autres ont tout faux. C’est très binaire. Je pensais tellement avoir la science de mon côté que j’en ai perdu mon bon sens. Mais toi aussi tu n’en démordais pas ! Il faut avoir des sacrés nerfs d’acier face à des végétaliens convaincus et tu les as eu 🙂 En tout cas tu as eu de la patience avec moi ! Une image me vient : c’est comme chez les alcooliques anonymes : tu dois te pardonner ainsi que faire amende honorable auprès des gens à qui tu as fait du mal. Et bien chez les ex végans anonymes tu t’excuses auprès des gens que tu as saoulés.
Le Mythe : Moi aussi je suis convaincue d’avoir la science infuse 😀 Je reconnais toujours ce désir de vouloir sauver les gens, qu’elles que soient mes convictions et croyances du moment. On se ressemble sûrement plus qu’on ne l’imagine, végan ou omnivore, finalement. En tout cas, j’étais vraiment agréablement surprise que tu me contactes sur la messagerie de la page. Oui, il faut des nerfs d’acier pour se disputer comme on le faisait 
La curiosité me pousse à avoir envie de te demander ce qui s’est passé au terme de ces deux années de régime végétalien faible en gras et riche en céréales et légumes qui avait l’air de te convenir un moment de ta vie ?
Curiosité supplémentaire de ma part : te supplémentais tu en B12 avec des doses adaptées ?
Mélissa : Alors, je suis de nouveau tombée enceinte. La grossesse s’est plutôt bien passée mise à part des grosses fatigues dues à une carence en fer qui ne remontait pas malgré les compléments en fer. Là où les choses se sont corsées, c’est lorsque mon fils est né. C’était un gros bébé qui avait un très gros appétit. Au fil des mois d’allaitement, mes muscles fondaient littéralement et je commençais à avoir des douleurs aux articulations comme ma grand mère de 80 ans alors que j’en ai 24. Lorsque je me regardais dans le miroir, je voyais que mon visage s’était creusé, j’étais devenue très pâle, j’étais en permanence fatiguée mentalement et physiquement. Pourtant je mangeais des légumineuses, des céréales riches en fer avec très bon appétit, mais ma digestion était de plus en plus difficile, quoique je fasse. En 7 mois d allaitement j’ai pris 15 ans dans la face et dans le corps, si ce n’est plus. A ce moment là, J’ai commencé à sincèrement douter de mes capacités à être mère. Je me suis toujours supplémentée selon les recommandations de la Fédération Végane française, et du groupe Facebook Vive la B12.
Le Mythe : C’est dur ce que tu racontes en tout cas, parce que le petit âge des bébés, la maternité, c’est un moment très exigeant, et la majorité des mamans qui mangent de tout sont exténuées. Du coup, qu’est ce qui t’a mis la puce à l’oreille, qui t’a fait penser que ton état pouvait être plus que la fatigue « normale » d’une jeune mère ?
Mélissa : Sincèrement je pense que je ne m’en serais jamais rendu compte par moi même. Un jour je suis tombée par hasard ou grâce aux algorithmes YouTube sur la chaîne anglophone « Vegan Deterioration ». Les vidéos parlaient des signes de malnutrition chez des YouTubeurs végans, et je me suis très vite rendu compte que j’avais les mêmes symptômes que ces personnes. J’étais ni plus ni moins en train de totalement me déteriorer physiquement ! Il y a aussi la chaîne Sv3rige, un homme qui s’est fait connaître en mangeant de la viande crue à des événements végans. Je pense qu’à ce stade où j’étais arrivée, mon désir de vivre était si fort pour mes enfants que j’étais ouverte à toute éventualité. Alors j’ai recommencé à manger des oeufs, du beurre et de la viande du jour au lendemain. Je parlerais « d’instinct de survie », je ne saurais me l’expliquer autrement.
Le Mythe : Tu parles de signes de malnutrition et de symptômes. Tu voudrais nous raconter lesquels par exemple ? Tu as essayé de modifier ta façon de t’alimenter tout en restant végan, en ajoutant davantage de graisses végétales à tes repas, ou tu es directement revenue vers l’omnivorisme ?
Mélissa : Le plus frappant c’était mon visage : les os des paupières saillants, le teint pâle constamment, une auréole sombre autour des yeux, mes dents se sont assombries, des rides horizontales sur le front sont apparues et une perte de cheveux qui commençait à se voir. Pour une jeune femme de 24 ans c’est déjà pas mal !! J’ai incorporé très vite des oeufs tous les matins, des tartines de pain beurré et de la viande une à deux fois par jour avec des légumes cuits. j’ai drastiquement réduit la quantité de céréales que je mangeais. Je n’ai demandé aucun conseil, je me suis juste rappelée ce que mon père et ma grand-mère me faisaient à manger, petite, rien de plus. Je me suis éloignée de tous ces groupes Facebook végétaliens où il est impossible de demander conseils dans ce genre de situation.
Le Mythe : Je comprends. Tu étais suivie médicalement ?
Mélissa : J’avais fait des examens lors de ma deuxième grossesse, et sur les résultats d’une prise de sang, on voyait que mon fer était bas ainsi que mon cholestérol qui était en dessous de la fourchette normale. Avant je pensais que c’était très sain, maintenant je me dit tout à fait l’inverse.
Le Mythe : Tu remanges des produits animaux depuis combien de temps ?
Mélissa : Je remange des produits animaux depuis un mois et demi et c’est le jour et la nuit. Je me dit souvent je suis devenue végétalienne pour être en meilleure santé et j’en ressort pour ne pas mourir !
Le Mythe : C’est fort de lire ça ! Tu as remangé quoi en premier ?
Mélissa : Une tartine très généreusement beurrée : le paradis. Et une bonne tranche de viande rouge saignante. J’avais l’impression de revivre. J’ai ressenti un réel mieux-être au fur et à mesure des jours. Mon corps avait besoin de protéines, de graisses saturées, de cholestérol, de fer… Tout ce que mes allaitements m’ont pris sans que je ne l’obtienne par mon alimentation. Aujourd’hui j’ai un tout autre aperçu sur le végétalisme. Tout le gloubiboulga écologique contre le peuple a son insu.
Le Mythe : Tu évoques tes grossesses et tes allaitements. Niveau organisation familiale, ça se passait comment chez toi ? Tes enfants et ton conjoint avaient adoptés la même alimentation que toi ?
Mélissa : Ma fille qui est mon aînée a commencé sa vie en mangeant très peu de produits animaux, mais mon conjoint lui avait progressivement fait manger de tout. Mais aujourd’hui je me dit que ce n’était pas suffisant malgré tout. J’ai essayé de convertir mon conjoint, il avait commencé à beaucoup réduire sa consommation de viande et de beurre. Mon fils a commencé sa diversification « normalement » mais maintenant j’incorpore un pourcentage plus important encore de produits animaux que ce que préconisent les recommandations. Il a un gros appétit et j’ai la conviction que c’est mieux pour lui.
Le Mythe : Qu’ont pensé ton entourage familial et amical de tes choix, et de ton retour à l’omnivorisme ? Ils n’étaient pas trop étonnés ?
Mélissa : Ils sont plutôt contents, mais ils m’ont surtout fait remarquer à quel point j’étais entêtée. Il me disent que je mange trop de produits animaux maintenant !
Le Mythe : C’est un revirement assez classique après une période de restriction peut être ! Les produits animaux te manquaient et te faisaient envie du temps de ton végétalisme ? Ou tu en étais vraiment dégoûtée ?
Mélissa : Non je n’en avais pas plus envie que ça. Je tournais 24/24 au glucides, je pense que mon corps est devenu progressivement accro.
Le Mythe : Tu saurais nous raconter comment c’était, le moment précis où le doute s’est emparé de toi ? Le moment où tu as commencé à imaginer remanger des produits animaux ? C’était comment ? Douloureux ? Excitant ? Autre chose encore ?
Mélissa : Il y a un mois et demi, après avoir regardé plusieurs vidéos d’ex végans ayant les mêmes symptômes que moi, je me suis dit qu’il était temps que je change de paradigme. Pour moi remanger de la viande, du beurre et des œufs fut plutôt un soulagement et une surprise au vu des bienfaits que je ressentais jours après jours.
Le Mythe : Est-ce que tu peux dire que le doute était installé dans ton esprit avant même de regarder les vidéos ? Tu les aurais regardées si tu n’avais eu aucun doute ? C’est un truc important pour moi de comprendre ce qui fait qu’on peut se confronter ou pas à des vidéos – textes – arguments de « l’autre camp », s’il est nécessaire que l’on ait déjà les certitudes un peu écornées ?
Mélissa : Plus mon état se détériorait, plus je mettais en doute mon alimentation. J’ai toujours été ouverte d’esprit et prête à la remise en question. Et puis il s’agissait de ma santé et celles de mes enfants ! Je ne vois pas comment l’expliquer autrement. Ces vidéos et témoignages de Sv3rige, Vegan Deterioration, et Franck Tufano sont tombées à pic. Une logique implacable en découlait. Nous sommes des animaux et si nous n’en mangeons pas, alors nous nous mangeons nous même (notre propre graisse, nos propres protéines, nos propres nutriments que nous avons stockés avant le végétalisme.) Deux allaitements et une grossesse ont eu raison de mes réserves. Certaines tiendront plus longtemps, d’autres moins, mais c’est une lente déchéance, car notre corps est très résistant à mon avis.
Le Mythe : Je pense que ce qui peut intéresser les gens, c’est de lire ce qui s’est produit en toi, mentalement et dans ton corps, quand tu as remangé des produits animaux.
Mélissa : Tout d’abord j’ai incorporé à mon alimentation une bonne quantité de beurre cru et de viande rouge. Mes repas ont considérablement réduit en quantité. Je mangeais beaucoup en étant végétalienne à cause de mon allaitement. Ma digestion s’en était beaucoup ressenti. Je digère mieux depuis que je remange des produits animaux en quantité, j’ai moins de gaz et de douleurs dans le gros intestin. Ma satiété est décuplée. Une quinzaine de jours après avoir remangé de la viande et du beurre, des couleurs sont revenues sur mon visage, ma peau est devenue moins sèche, mes yeux moins cernés, moins sombres. Mon conjoint me dit que j’ai rajeuni ! J’ai même regagné un peu de pulpe autour des yeux.
Le plus frappant est un léger renforcement musculaire sans faire de sport. Je suis aussi beaucoup moins épuisée, (toujours un peu car deux enfants cela demande de l’énergie), mais l’épuisement n’est plus constant. Voilà pour les grandes lignes. Maintenant je partage avec plaisir les même aliments que les autres membres de ma famille. Je ne me fait plus ma nourriture à part comme avant. Cela joue aussi beaucoup sur le bien-être. Quand on est végétalienne ont scrute tous les aliments et chaque repas en commun est un stress. Cela ne fait qu’un mois et demi que je suis redevenue omnivore, alors cela m’encourage beaucoup pour la suite. Quand j’étais végétalienne, j’avais parfois des palpitations cardiaques deux fois par semaine mettons. Pour le moment je n’en ai plus ressenti, espérons que cela dure.
J’ai un peu honte. D’une d’avoir été trompée et de deux, d’avoir essayé de tromper mes proches malgré moi. Maintenant j’admire ceux qui n’ont pas cédé à la tentation du végétalisme. Avant je pensais qu’ils n’y « comprenaient rien », qu’ils étaient ignorants. Maintenant je considère que j’ai beaucoup de choses à apprendre de ces personnes. En ce qui concerne mes connaissances en nutrition, tout est à refaire. C’est pour ça que je considère ton site comme un repère, malgré nos différends par le passé, et c’est pour cela que je t’ai contactée.
Le Mythe : Les nouvelles personnes qui deviennent végans, au moment où toi tu arrêtes, si tu avais un message à leur faire passer, au vu de ton expérience ?
Mélissa : Que dire ! Si aucune population dans l’histoire des hommes n’a jamais été végétalienne, je pense maintenant qu’il y a une bonne raison à cela. Je dirais que toute expérience est bonne à prendre mais qu’il est extrêmement important d’écouter son corps. Si votre santé passe après les animaux alors le végétalisme est fait pour vous. Le végétalisme est un leurre, une impasse pour ceux qui y voient une vie en pleine santé. Je dirais surtout aux mamans allaitantes et aux futures mamans de ne pas risquer la santé de leurs enfants pour le véganisme. Pour les autres qui veulent tenter le végétalisme, et bien le temps fera son travail.
Le Mythe : Quand tu étais végétalienne, ça te faisait quoi de penser qu’aucune population n’avait jamais été végétalienne, justement ? Je me rappelle que lorsqu’on se disputait, en commentaires d’un article de mon blog, justement, je te le disais 😀
Mélissa : J’omettais ce détail pour me conforter dans mon alimentation. Il y a tellement d’études scientifiques qui prouvent que les végétaux sont excellents pour la santé que pour moi il était tout à fait cohérent que le végétalisme soit supérieur à toute autre façon de s’alimenter.
Le Mythe : On est en effet abreuvés d’informations sur le fait que les végétaux soient bons pour la santé (ce qui n’est pas faux évidemment), en même temps que nous sommes bombardés de messages affirmant de toutes parts que les produits animaux seraient néfastes. C’est un sacré parcours et une sacrée remise en question que tu as effectué. Comment envisages-tu la suite des choses pour toi ? Comment tu penses que ton témoignage sera reçu par les personnes qui t’ont connue végan, sur Facebook par exemple ?
Mélissa : Je vais renouer avec les traditions culinaires de ma famille, ma grand mère est très bonne cuisinière, et elle sera très heureuse de m’apprendre à nourrir correctement ma famille. Bien sûr je vais continuer à me pencher sur le sujet de l’alimentation « idéale », car c’est quelque chose qui me passionne, mais avec un tout autre regard. Je pense que les personnes qui me suivaient et lisaient mon blog seront déçues, c’est certain. Je sais qu’elles trouveront toutes les mauvaises raisons possibles pour expliquer mon changement d’alimentation. Aujourd’hui la santé de mes enfants prime sur mon appartenance virtuelle à un groupe idéologique. Et je leur souhaite bonne chance pour la suite.
Le Mythe : Merci Mélissa, c’est une conclusion belle et terrible à la foi, qui je trouve fait honneur à ton expérience.